Passage obligé de cet entre-deux tours consternant, la course au sac des deux godelureaux à la chasse aux voix.
La recette est connue : comme au premier tour asséner à peu près n’importe quoi sur n’importe quel sujet, mais avec le côté débridé en plus. Au premier tour on se fâche, au deuxième on se lâche.
Et tout y passe.
Chez Le Pen on laisse donc entendre que le voile islamique, finalement c’est pas si grave (après tout, dans foulard il y a lard), pendant que côté Macron, les dents rayent le parquet oui, mais un parquet bio durable parce que « c’est notre projeeeeeeet ».
Même sérénade donc et à fond sur le numérique (à prononcer nu-mai-rik, d’un air entendu, surtout si vous n’y entendez rien)
Après Marine Le Pen, l’air bœuf mironton minaudant sur ses chats, après Emmanuel Macron, en vieux copain (jusqu’à dimanche) de la promo Vert-mais-louche, retour donc des grabataires vers le futur, pire vers la réinvention (on ne rit pas), et place donc au bla-bla numérique, terre de mission façon télé-réalité pour candidats à quatre sous.
Soyons justes, nous n’avons pas été déçus.
Certes, et comme le relève « Le Monde », les deux gougnafiers, Berta et Blanc-Bec, sont d’accord sur « le développement du très haut débit en France ».
Merci patron, en voilà une nouvelle ! On espère qu’ils sont aussi pour la poule au pot le dimanche et contre l’urticaire géant des professions de foi électorales. Cela dit même si nous pouvons gager que les thuriféraires du jour de la 5G n’ont pas trop l’idée sur ce qu’il faut ou non entendre aujourd’hui par « très haut débit », au moins les voici un peu moins cacophones du giga.
Passé ce hors d‘œuvre consensuel façon mousseline, il fallait entrer dans le dur. Et là, préparez vos mouchoirs.
D’abord le matériel (US évidemment) et là Mme Le Pen, elle l’a dit, elle veut la « souveraineté numérique ». Bien oui, c’est pas compliqué : la souveraineté en tout, et donc aussi en numérique. Comme dans ce domaine quasiment tout (matériel, soft, gestion des données, commerce, etc …) est américain, il fallait l’oser, le « y’a qu’à »! C’est sûr, on va se passer sans problème de Microsoft, Apple, Dell, HP, Amazon, Google, Facebook, Intel, AMD ….. En gros on va faire en 5 ans ce qu’on n’a même pas cherché à faire en 25 ans (et qu’on est donc totalement incapable de faire aujourd’hui et pour longtemps). Dans le genre vieux pieux pour foule en laisse, on aura du mal à trouver mieux.
Remarquez côté Macron c’est pire, c’est-à-dire aussi bête mais pour demain : « Nous n’avons pas, en Europe, l’équivalent des entreprises américaines. (…) Il n’est pas vrai que l’on aura quelque chose de 100 % français ou européen tout de suite. (…) En attendant, il faut assumer le fait que, pour partie, l’on va faire avec du cloud américain, que l’on peut, en revanche, réguler ».
Alors là nous disons, chapeau l’intermittent du spectacle ! Dix ans que Manu est sur place, dont cinq chez Fanfoué, cinq en solo, et candidat à une rallonge de cinq ans, le chef du rayon détrousse-chemise découvre qu’il n’a rien du tout … en rayon ! Quant à « réguler », la bonne blague, nous frisons le serment d’ivrogne. Réguler ? ce sont ceux qui dérégulent qui en parlent le mieux.
Ensuite les Gafam (toujours américains ben oui) : alors en voilà, un sujet qui parle.
Les Gafam ? Mais si, vous savez, ces monstres (numériques évidemment, c’est dire si ça nous file entre les doigts) ces monstres dont on ne peut (ni ne veut) se passer mais qu’il faut bien montrer du doigt, histoire d’avoir l’air de ne pas trop avoir l‘air. En tout cas les Gafam ça nous fait, non pas, comme dirait Maurice, d’excellents français, mais bien de parfaits ahuris :
Le Pen : « renforcer le contrôle des rachats d’entreprises françaises » (dans le secteur y’en a encore ?), imposer « une ouverture contrainte de capital à des sociétés européennes » ou « obliger les maisons mères, dont des filiales exercent en Europe à rompre le lien hiérarchique qui les unit ». Mais c’est bien sûr ! Et c’est pour manger tout de suite ou pour emporter ? D’autant que, quand « Ma’am Y’a qu’à » aura fermé le pays aux étrangers, et déchiré deux ou trois grosses de traités internationaux, ça va être du gâteau, vous pensez.
Attendez, il y aussi Macron : « Il ne faut pas hésiter à envisager le démantèlement des plates-formes numériques en situation de monopole ». Ah ouais ! alors ça c’est craché ! Chiche ! Allez : on démantèle Facebook. Et après on verra. Et pourquoi pas couper Google en confettis ? On peut tout faire. Et même (et en même temps) le contraire de tout. Et si on décidait de remanteler Manufrance ?
Et pour suivre ? alors là du très lourd : la cybersécurité.
C’est lourd parce que ça sent fort. Très fort.
Déjà ça sent la sécurité, et là l’odeur on connait, un peu ligne rouge avec un zeste de raideur à Lallemand, mais toujours limite garde à vue.
Mais ça sent aussi le cyber et là il faut de l’intuition olfactive, parce que le cyber (au ministère on dit « la » Cyber, ça fait plus start’up), le cyber donc, tout le monde n’en a pas chez soi. Comment le décrire, le cyber (pour cyber-nétique) disons que c’est un peu comme un flan. Un flan qui bouge tout le temps, qui tremble toujours un peu, qui dit Manu quand on le touche, et qu’on-sait-pas-tout-ce-qu’il-y-a-dedans-boudiou, sauf que si ça tombe on sait qu’on ne le rattrape pas. Et il y a intérêt à pas oublier d’y toucher un peu tout de même (sans quoi il nous laisse comme deux ronds de lui-même) mais en l’empêchant de tomber. Donc il lui faut de la sé-cu-ri-té (on espère avoir été clairs parce que c’est très technique).
Et donc pour garder le cyber au chaud, nos fiancés de la semaine ont … des idées (si, si)
Asseyez-vous quand même.
D’abord pour M. Macron, la cyber-sécurité c’est une « grande menace de notre temps ». Il a dû se tromper, c’est seulement la chute du flan qui craint. Mais la formule fait son petit effet. Evidemment « notre temps » c’est pas rien. Faut aussi oser le dire. Vous avez remarqué ? le premier qui dit « notre temps », du coup c’est un peu le sien. Et heureusement qu’il y pense à notre temps, parce que dedans y’a plein de menaces, et des grandes. Et comment le chef de rayon prévoit-il de conjurer les menaces ?
Tenez-vous bien : « en recrutant des « cyber-patrouilleurs », chargés de veiller « pro-activement » à la sécurité informatique mais surtout la création d’un « filtre anti-arnaques » qui « avertira en temps réel tous les usagers d’Internet avant qu’ils ne se rendent sur un site potentiellement piégé ».
En gros M. Macron nous promet un ….. antivirus. On devrait lui dire que ça existe depuis 20 ans et qu’on le met à jour tous les matins. Mais à quoi bon ? un type qui s’imagine, de nos jours encore, que l’anti-arnaque reste à inventer, et que ce sera des types derrière des écrans qui traqueront le fraudeur, ce type a la vison du web de ses 20 ans. Ce n’est pas très étonnant. M. Macron a découvert l’informatique il y a 25 ans. Depuis il n’y a rien compris et il n’y connait rien. Il est vieux et nous propose ce qu’on a déjà tous en trois exemplaires. Quelle misère.
Et Mme Le Pen ? Comme il fallait s’y attendre, ça ne vole pas plus haut. Pour elle aussi, la cyber-sécurité se résume à du matériel, des logiciels et (ne riez pas) des « capacités de détection », sous forme de « commandos ». Même niveau donc que l’autre : zéro pointé. Les bronzés font de l’Ipad. A pleurer. Goldorak revient !
Bon, c’est presque tout vu. Le matos, les Gafam, la Cybersécurité, tout ça c’est fait. Ah, on allait oublier les réseaux sociaux !
Honnêtement on aurait pu s’en passer. Mais non, une campagne électorale c’est comme l’assiette honnie : il est instamment « conseillé » de finir le plat de nouilles froides. Même après 16 heures.
Et là, sans surprise chacun de nos deux hackers du dimanche prochain se concocterait bien son petit bidule.
M. Macron prône, on s’en doutait un peu, un renforcement de la régulation. Qui ne suit pas le discours officiel tenu par Sa Grandeur est fatalement en phase de « recroquevillement » évidemment favorisé par la « violence par l’anonymat » qui « ne devrait pas exister » dans ce qu’il estime une « société démocratique ». On connaissait l’addiction de l’actuel chef de l’Etat pour une bonne petite démocratie façonnée à sa pogne. Vous aurez remarqué là aussi la « régulation », vocable fourre-tout qui permet (en même temps) de prétendre réguler Google et de mettre au pas ses opposants. Vous avez dit démocratie ?
Pour Mme Le Pen, c’est le contraire : pas de régulation du tout, ce qui est aussi stupide et orienté qu’une régulation pro domo, puisque tous les deux découlent d’un dirigisme d’État, quel qu’en soit le degré de sournoiserie démissionnaire.
Evidemment personne n’envisage de confier la régulation à une structure judiciaire qui soit adaptée, et aux délits rencontré sur le web, et à l’instantanéité de leurs commissions. Trop compliqué sans doute, trop objectif aussi, pour qui ne cherche qu’à s’imposer, qu’à imposer.
Telles sont donc les consternantes élucubrations « produites » par les candidats à l’Élysée, et leurs équipes (ça fait peur), tous deux entièrement plantés dans un schéma complètement dépassé, à la ramasse permanente de ce qui n’est plus depuis des lustres, incapables d’imaginer ce qui pourrait être et encore moins de créer les conditions de la moindre prospective.
Rien sur l’informatique quantique, rien sur l‘intelligence (ou pas) artificielle, rien sur les nouveaux semi-conducteurs, rien sur les sciences liées, rien sur les métiers du futur, rien sur les secteurs qui demandent aujourd’hui un minimum d‘inventivité pour que nos enfants ne soient pas une nouvelle fois victimes de l’indigence conceptuelle de nos dirigeants.
Entre le camériste des start’up et la veuve des douanes, un point commun : le retour vers le passé des vieux largués.
On reste pantois devant tant de prétention, d’incompétence, de négligence, et pour tout dire de désintérêt pour tout ce qui n’est pas la minuscule vision de leur monde poussiéreux.
On se croirait revenus à l’époque de Sarko jouant avec son Blackberry sans même se rendre compte que toutes nos données gouvernementales étaient aspirées par les ricains.
Par pitié, qu’on nous débarrasse donc de ces vieux abrutis ….